Of bees and baffled naturalists

In a nutshell, my research explores the ways in which eighteenth-century French thinkers were transformed by their engagement with insects. Thanks to a generous grant from the Voltaire Foundation, I had the opportunity to study the large collections of letters exchanged between the most important observers of insects of the Enlightenment – mainly Antoine Ferchault de Réaumur and Charles Bonnet – held at the archives of the Académie des Sciences in Paris and of the Bibliothèque de Genève.

‘Mouches à miel, ruches’ (1762) from Diderot and D'Alembert's Encyclopédie

‘Mouches à miel, ruches’ (1762) from Diderot and D’Alembert’s Encyclopédie (with thanks to ARTFL)

To give you an example: the way in which insects constantly thwarted observers’ expectations about nature’s supposed laws influenced new standards for verification. In 1770, the Journal des savants published a report on the German naturalist Adam Gottlob Schirach’s observation that all bee larvae, thought to be sexless, could be turned into a queen bee simply by being fed differently than the other worker bees. [1] That the gender of an animal was not determined from the start of its life disturbed naturalists’ idea of natural laws. As the Swedish observer Charles De Geer wrote to his Swiss friend Charles Bonnet:

‘J’avoue que cette observation ne m’étonne pas seulement, mais même qu’elle me répugne; je ne sçaurai jamais croire, que le ver d’une abeille ouvriere, sans sexe, pourroit devenir une abeille femelle, par la seule façon d’être nourri différement. De telles sortes de métamorphoses sont inouïes dans l’histoire naturelle.’ [2]

Because of the contentious nature of Schirach’s observations, the Journal required a trustworthy naturalist to verify them. Thus, Duhamel de Monceau asked Bonnet, on behalf of the Académie des Sciences, to repeat Schirach’s observation, again emphasising the way in which it contradicted nature’s laws:

Portrait of Charles Bonnet, engraving by Johan Frederik Clemens (1779) after a painting by Jens Juel (1777)

Portrait of Charles Bonnet, engraving by Johan Frederik Clemens (1779) after a painting by Jens Juel (1777)

‘Les experiences de M. Schirach sont singulieres Monsieur et elles semblent renverser tout l’ordre de la nature. Mais elles ont été suivies avec des précautions qui engagent à y avoir confiance et je ne peux leur refuser la mienne quand je vois qu’elles ont merité votre approbation. Cependant l’academie etant dans l’usage d’en adopter les choses qui paroissent s’éloigner de la marche ordinaire de la nature qu’après un severe examen elle se propose de faire repeter les experimens de Mr Schirach et pour cela je suis chargé de vous demander les details suffisants pour les exécuter.’ [3]

Since naturalists and philosophers looked to ‘nature’, including insects, to understand human behaviours, such discoveries about the fluidity of gender roles were troubling. Despite the fact that naturalists repeatedly emphasised their openness to the surprises of insects, these creatures continued to puzzle them. Verification according to a set of prescribed, accepted procedures could somehow curb the uncontrollable contradictions of insects; as they continued to show surprising behaviours, the naturalists continued to evolve their methods for understanding them.

– Elisabeth Wallmann, University of Warwick

 

[1] Charles Bonnet, ‘Lettre sur les abeilles, adressée à messieurs les auteurs du Journal des savants’, Le Journal des savants, November 1770, p.746-53.

[2] De Geer to Bonnet, Bibliothèque de Genève, Ms. Bonnet 30, 19.7.1771.

[3] Duhamel de Monceau to Bonnet, Bibliothèque de Genève, Ms. Bonnet 30, 23.3.1770.

Nouvelles perspectives sur les manuscrits des Lumières

Dans le cadre superbe de l’hôtel de Lauzun, l’Institut d’études avancées de Paris a accueilli le 26 mai 2014 une journée d’étude destinée à faire le point sur certaines des découvertes récentes dans la recherche sur les manuscrits du Siècle des Lumières. Depuis quelques années, l’actualité attire l’attention sur certains manuscrits mythiques, comme celui d’Histoire de ma vie de Casanova qui a rejoint les collections publiques de la Bibliothèque nationale de France en 2010 grâce à un mécène, ou bien tout récemment, le rouleau des 120 journées de Sodome de Sade enfin de retour à Paris, pour y être exposé à l’automne au Musée des Lettres et Manuscrits.

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Le manuscrit des 120 journées de Sodome

Les salles de vente bruissent des papiers des écrivains du XVIIIe siècle: ceux d’Emilie du Châtelet sont passés il y a peu aux enchères ainsi que dernièrement ceux de Portalis, l’un des auteurs du Code civil, dont la Cour de Cassation a réussi à acquérir le dossier génétique complet d’une de ses œuvres, la Consultation sur la validité des mariages protestants de France, qui comprend une copie au net annotée de la main de Voltaire.

Tandis que les manuscrits sortent des coffres et s’exposent derrière des vitrines ou sur des écrans numériques, de leur côté les chercheurs se lancent dans leur patiente analyse. Ce fut le but de cette journée, organisée par Nicholas Cronk, Nathalie Ferrand et Andrew Jainchill en collaboration avec l’équipe Ecritures du XVIIIe siècle de l’Institut des Textes et Manuscrits Modernes, de montrer tout l’intérêt, pour la compréhension et l’interprétation des œuvres, de l’étude de leurs états préparatoires et remaniés.

La page de titre des Considérations sur le gouvernement du marquis d’Argenson (1764)

La page de titre des Considérations sur le gouvernement du marquis d’Argenson (1764)

Ouvrant la matinée avec une intervention consacrée au marquis d’Argenson, Andrew Jainchill (Queen’s University, IEA) a présenté quatre états manuscrits de ses Considérations sur le gouvernement ancien et présent de la France, l’une des critiques les plus vives de la monarchie française au XVIIIe siècle – citée plusieurs fois dans le Contrat Social – dont il put interpréter l’évolution en fonction des additions de l’auteur dans ses différentes versions.

Après la théorie politique, c’est la philosophie naturelle de Mme du Châtelet qui fut l’objet d’une étude menée par Karen Detlefsen (U. of Pennsylvania) et Andrew Janiak (Duke U.), à partir d’une comparaison des manuscrits de ses Institutions de physique conservés à Paris et à Saint-Pétersbourg. Dans l’après-midi, Nicholas Cronk (U. of Oxford, IEA) a présenté les dernières découvertes dans le domaine voltairien, et a montré à quel point la recherche des manuscrits est féconde – y compris pour des auteurs canoniques comme Voltaire dont on croit tout savoir –, puisqu’on continue de découvrir de nouveaux manuscrits qui renouvellent les connaissances établies.

Au plus près du papier et des instruments d’écriture des auteurs, Claire Bustarret (CNRS-EHESS) a ensuite présenté les apports de la codicologie pour déterminer les campagnes d’écriture au sein de corpus manuscrits imposants, comme dans le cas des papiers de Condorcet. La journée s’est achevée par une intervention de Nathalie Ferrand (CNRS-ENS) sur l’importance croissante accordée aux manuscrits d’auteurs au sein des études dix-huitiémistes et sur le rôle qu’ont pu jouer les manuscrits des Lumières dans l’émergence progressive de la critique génétique au cours du XXe siècle, concluant par l’interprétation génétique d’une page de La Nouvelle Héloïse que Rousseau récrit en puisant au lyrisme du Tasse.

– Nathalie Ferrand, Ecole normale supérieure-CNRS

Caption: Page de corrections de La Nouvelle Héloïse de la main de J.-J. Rousseau

Caption: Page de corrections de La Nouvelle Héloïse de la main de J.-J. Rousseau